Edito Citywire Santé : Croissance par l’innovation et opportunités tactiques

16 décembre 2024

Le secteur de la santé, évalué par Montpensier Finance à plus de 9 000 milliards de dollars à l’échelle mondiale, affiche une dynamique exceptionnelle. Avec un taux de croissance annuel moyen d’environ 8 % pour les années à venir, soit près du double de celui du PIB mondial, il se distingue par sa résilience. Peu sensible aux cycles économiques, ce marché bénéficie d’une stabilité remarquable, même en période de récession, portée par le vieillissement démographique qui accroît inévitablement les dépenses de santé.

L’émergence de nouvelles modalités de traitement : anticorps complexes -bispécifiques et conjugués-, thérapie génique, thérapie cellulaire… apporte énormément d’espoirs pour le traitement des maladies chroniques ou incurables. L’IA permet d’ores et déjà un gain de temps significatif dans la mise en point des candidats-médicaments en phase pré-clinique qui va accélérer ce phénomène. Elle promet de répondre à l’enjeu majeur auquel font face les laboratoires, à savoir l’amélioration de la productivité de la R&D alors que plus de 90% des molécules échouent dans leur développement clinique. Une étude IQVIA récente montre que le succès en 1ère phase clinique des molécules développées par l’IA atteint 85% contre 55% selon les méthodes traditionnelles ce qui permettrait de quasiment doubler la productivité d’un développement clinique complet.

Une actualité dense et dynamique, source d’opportunités

Si les médicaments contre l’obésité restent un sujet majeur, les investisseurs sont à juste titre plus exigeants sur l’innovation incrémentale. Des nouveaux médicaments apparaissent notamment pour préserver la masse musculaire de la perte de poids. L’oncologie reste l’aire thérapeutique en plus forte croissance malgré une forte concurrence et concentre 45% des investissements en R&D. Certains résultats ont été spectaculaires, notamment ceux de Ivonescab de Akeso Bio et Summit Therapeutics qui a doublé durée de survie médiane par rapport au traitement de référence dans un sous-type de cancer du poumon ou le besoin médical reste très fort. L’ARN interférant s’est également imposé comme une modalité de référence pour moduler l’expression des gènes dans les maladies rares avec l’approbation imminente du Vitusiran d’Alnylam -en partenariat avec Sanofi- dans l’amylose cardiaque et les succès cliniques d’Avidity Bioscience. Il pourrait offrir des progrès spectaculaires à des patients en échec thérapeutique dans les prochaines années.

Après un boom fin 2023, l’activité de fusion et acquisitions a ralenti mais avec une tendance des laboratoires pharmaceutiques à faire des acquisitions de sociétés plus en amont afin de créer plus de valeur à long terme. Nous attendons clairement une accélération sur 2025 alors que l’importance de la génération de trésorerie du secteur a permis de reconstituer une importante force de frappe.

La reprise des Sciences de la vie -diagnostic, bio production, externalisation de R&D- s’est amorcée notamment en ce qui concerne le business récurrent mais a été freinée par une somme facteurs ponctuels : pression sur les équipements avec la persistance de taux élevés et des tensions Sino-Américaines et réduction des dépenses de certains laboratoires particulièrement impactés par l’« Inflation Reduction Act » en termes de protection brevetaire. Ces mouvements touchent à leur fin et la relocalisation des usines en occident -à l’image du développement d’un site par majeur par Lonza en Suisse va permettre un rebond des investissements. Les valorisations de ces valeurs en croissance structurelle sont aujourd’hui inférieures à leur multiples de long terme pour des marges également inférieures à un niveau que l’on peut considérer normatif, constituant une opportunité majeure d’investissement.

A l’inverse, les sociétés de dispositifs médicaux ayant bénéficié de la normalisation du contexte hospitalier après la « grande démission » sont sensiblement plus chères que par le passé nous rendant sélectifs en nous concentrant sur les innovations de rupture et les titres peu consensuels.

Bien que moins agiles en découverte que les petites sociétés, les laboratoires ont encore un rôle majeur à jouer. Ils restent les plus à mêmes de distribuer au plus grand nombre les nouveaux traitements grâce à leur expertise accumulée. Ils sont capables de proposer les meilleures combinaisons de molécules dans le respect des contraintes budgétaires des payeurs. Il est indispensable d’être sélectif en privilégiant ceux qui conservent un faire savoir-faire de recherche en interne de pointe et qui concentrent leurs moyens sur un nombre limité d’aires thérapeutiques. Les laboratoires qui génèrent la part de leurs ventes la plus importante grâce à leur R&D interne sont les plus performants en bourse dans la durée. L’Europe a des atouts dans ce secteur et selon nous les acteurs les plus performants en dehors de Eli Llily, co-leader dans l’obésité avec Novo Nordisk.   

Comment tirer parti de cette thématique pour investir ?

La santé entre dans une phase d’accélération structurelle de sa croissance grâce à l’innovation. Afin de capturer au mieux le plein potentiel de ces tendances globales, nous avons adopté une approche méthodique. Celle-ci repose sur trois segments privilégiés à fort potentiel :

  • Le segment Diagnostic (300 milliards de dollars), comprend les entreprises actives dans les analyses biologiques et l’imagerie médicale qui permettent d’offrir les meilleurs produits à chaque patient.
  • Le segment Découverte (350 milliards de dollars), vise à transformer les nouvelles modalités de traitements en médicaments qui changent le paradigme de traitement des pathologies au travers d’investissement dans des sociétés de biopharma et biotech.
  • Le segment Production et Distribution (1.600 milliards de dollars), vise à capter les opportunités offertes par la complexification de la production qui pousse à la hausse des taux d’externalisation – 40% à ce jour – et favorise les laboratoires concentrés sur des franchises fortes.

Une sélection des titres optimale vise à rechercher les entreprises dotées de managements de qualité, ayant une vision long terme et des intérêts qui sont alignés avec ceux des actionnaires. La validation de la thèse d’investissement doit confrontée au réel que ce soit au travers de rencontres avec le management ou à l’avis d’experts internationaux spécialisés que l’on peut contacter via des réseaux dédiés. Un portefeuille équilibré doit compter autour de 50 sociétés parmi les plus innovantes du secteur de la santé.  L’objectif est de privilégier les entreprises disposant, d’avantages concurrentiels forts, d’un « pricing power » solide et de barrières à l’entrée notables.

 

Auteur :  Olivier de Royère, Gérant du fonds Santé AESCULAPE SRI