2022 : année record pour le solaire ?

2 November 2022

Le constat le plus important de ces dernières années est qu’il faut accélérer les investissements liés à la transition climatique, comme confirmé par le rapport du GIEC. Cependant, nous notons une accélération de la prise de conscience collective (au niveau des citoyens, des états et des entreprises), soutenue par des objectifs de souveraineté énergétique en Europe, exacerbée par la nouvelle hausse des prix des énergies fossiles depuis l’invasion de l’Ukraine. Ajoutons à cela que la Chine a récemment confirmé ses engagements en termes de climat et qu’après de nombreux rebondissements, les Etats Unis ont adopté l’IRA (Inflation Reduction) dont le volet climatique s’apparente à un « Green Deal ». 

 

Dans ce contexte, le secteur du solaire photovoltaïque pourrait tirer son épingle du jeu.

Dans son rapport du 11 mai 2022, l’Agence internationale de l’énergie (IAE) a une nouvelle fois revu à la hausse ses prévisions d’installation de nouvelles capacités électriques renouvelables pour l’année 2022. Ainsi, c’est désormais 320 GW de capacités additionnelles (+10% par rapport aux capacités totales à fin 2021) qui sont prévues, l’équivalent des besoins annuels de l’Allemagne. Le solaire s’impose parmi ces énergies, représentant plus de 60% (190 GW) des nouvelles installations sur l’année.

L’énergie solaire photovoltaïque bénéficie grandement sa plus grande acceptabilité relativement d’autres technologies mais également de ses applications modulables. Son industrie est en plein essor, portée par l’innovation grandissante et une compétitivité accrue.

Ainsi les entreprises feront partie de la solution et les investisseurs auront plus que jamais leur rôle à jouer.

 

Depuis l’antiquité l’Homme rêve d’utiliser l’énergie du soleil. Mais c’est seulement au début du XXème siècle qu’elle fut exploitée pour la première fois. Un ingénieur américain, Frank Shuman, réussit ainsi à utiliser la chaleur du soleil à travers une installation qui en concentrait l’énergie. Sa première centrale, construite en Egypte en 1912, permettait de pomper depuis le Nil plus de 20.000 litres à la minute afin d’irriguer des champs de coton.

Une rupture technologique majeure apparut dans la deuxième partie du XXe siècle après quelques expériences de centrales solaires développées en Espagne, mais l’essor de la de la filière fut donné au tournant des années 2000 par l’Allemagne, désireuse alors de se doter d’une véritable filière solaire.

Alors, à grands coups de subventions, des dizaines de centrales solaires virent le jour, permettant ainsi à une industrie locale de fabrication de panneaux solaires de prospérer… jusqu’à la décision des producteurs chinois d’entrer dans la danse et de se positionner sur le marché en développant d’ambitieuses structures industrielles. A partir de 2010, de nombreux producteurs chinois, comme JA Solar ou Longi Solar, ont rapidement gagné des parts de marché et permis grâce à leur compétitivité prix de faire décoller l’industrie solaire mondiale.

Bien que le marché soit dominé par la Chine, de nombreuses innovations technologiques proviennent d’Europe, et plus spécifiquement de laboratoires publics de recherche, à l’instar du CEA-Liten, Solliance ou le Fraunhofer ISE. Ainsi certaines entreprises européennes, comme Rec Group en Norvège ou Recom Technologies en France, réussissent à développer leur activité grâce à une offre qualitative et innovante.

 

Les baisses de prix pratiqués par les fabricants chinois ont joué un rôle clé dans l’adoption de plus en plus large du photovoltaïque. Ainsi, l’Agence internationale de l’énergie (IEA) prévoit un nouveau record annuel sur les ajouts de capacités d’énergies solaires en 2022 (190GW) et confirme que le photovoltaïque pourrait même devenir à terme la première source d’énergie dans le monde.

Dans les faits, il existe deux types d’installation photovoltaïques : les installations sur le toit de bâtiments existant (environ 1/3 des installations au niveau mondial), ou les installations au sol (sur terre ou sur des structures flottantes).

Les installations au sol posent la question de la perte nette de place. Les plus grandes installations, soit en France (300MW – Cestas, développé par Neoen), soit en Espagne (500MW – Núñez de Balboa, développé par Iberdrola) s’étendent sur des superficies allant de 2,5 à 10 km. Et même le futur champion européen, prévu pour 2024 et développé par Solaria dans l’est de Madrid, dépassera de peu les 600MW et s’étendra sur 13 km2. Mais la contrainte d’espace peut également être résolue grâce à une organisation méthodique. C’est la voie empruntée par la société allemande Encavis, une des pionnières du secteur, qui cumule un portefeuille en propre de 1,3GW de capacités photovoltaïques, à travers plus de 160 installations, en Allemagne et en Italie notamment, offrant une taille moyenne de 8MW.

L’autre manière d’adresser la contrainte d’espace et de simplement le créer ! En 2012, Renault inaugurait l’une des plus grandes ombrières photovoltaïques du monde en construisant des ombrières de parkings photovoltaïques sur plus de 40 hectares. Depuis, les projets se sont multipliés : Groupe Charles André sur 12,5 ha, réalisé avec Neoen, Eurodisneyland Paris sur 17 ha, réalisé avec Urbasolar, ou encore Stellantis Sochaux sur 22 ha, réalisé avec Engie Green.

Jusqu’à présent, la baisse des prix des panneaux photovoltaïques a surtout été liée à des économies d’échelle. Les technologies utilisées ayant peu évolué : les cellules photovoltaïques en silicium monocristallin et celles en silicium polycristallin constituent le standard. Ces deux technologies offrent de bons rendements à un prix devenu attractif. Les panneaux ont une durée de vie de près d’une trentaine d’années et sont ensuite recyclables.

 

D’autres technologies existent mais pour des usages plus spécifiques. Une rupture technologique pourrait bouleverser l’industrie solaire photovoltaïque. Il s’agit des pérovskites. Désignant à l’origine une famille particulière de minéraux, ce terme, devenu générique par la suite, qualifie tous les matériaux partageant une certaine structure cristalline. Depuis 2012, les recherches se multiplient (combinaisons de matériaux, tandems pérovskite-silicium par exemple) afin de trouver des solutions industrialisables à grande échelle, à faible coût, tout en conservant un rendement important voire plus important que celui des cellules en silicium. D’ici à 2030, les pérovskites pourraient réduire le coût de la technologie solaire de 80%. La société Oxford PV est la première à avoir annoncé la production industrielle et la commercialisation pour 2022 de cellules tandem perovskite-silicium. La société polonaise Saule Technologies a développé un savoir-faire d’impression de cellules pérovskite très fines et souples, qui intéresse notamment des industriels comme Somfy, pour créer des brise-soleils photovoltaïques capables de générer jusqu’à 170W par m2.

 

En attendant l’arrivée des solutions de demain, certaines techniques utilisées dans l’installation des centrales solaires permettent d’en accroître significativement les rendements à l’instar des « trackers » qui permettent une orientation des panneaux en fonction du parcours du soleil ou encore panneaux double face utilisant la réfraction solaire sur le sol.